Correction partie 2 – texte de Bergson
La
conscience serait donc, et Bergson utilise le conditionnel pour avancer une
idée si perturbante pour ses lecteurs, la marque de l’actuellement présent. Ici
c’est la notion de durée que Bergson met en place : l’actuellement présent
suppose ainsi une conscience tournée toute entièrement vers l’instant. Où
plutôt, non vers l’instant, qui est une donnée mathématique sans épaisseur,
mais vers le présent qui est la donnée spécifique de la conscience en tant que durée.
La conscience se donne comme « un pont jeté entre le passé et le
futur », elle est cette épaisseur qui vient unifier perceptions et mémoire
afin d’agir. Il s’agit donc pour Bergson de faire comprendre que si le présent
est équivalent à l’action – épaisseur de temps qui vient saisir les éléments
afin d’atteindre un effet immédiat qui est le moment actuel – alors la
conscience serait le nom donné à ce pic qu’est l’unification de l’action. Nous
retrouvons ici la caractéristique de la conscience vigile telle que Descartes
l’avait énoncé avec cependant cette modification d’importance : si la
conscience est entièrement tournée vers l’action elle se détourne alors de ce
qui n’est pas utile à elle. La « marque caractéristique » du présent
telle est en fait la conscience. Elle est cette actuellement présent qui me
fait sentir et penser pour agir, et ce qui n’est pas utile à cette fonction
peut prendre alors le nom d’inconscient. Cette part d’ombre représente tout ce
qui est en dessous de l’action, tout ce qui n’est pas utile, non agissant… La
position de Bergson suppose alors une remise en cause, sinon en doute, de
l’équation de Bergson qui est la transitivité de la conscience avec l’existence.
La conscience n’est pas équivalente à l’existence mais à l’action prend soin
d’affirmer Bergson qui « limite » ainsi la portée de la conscience.
L’inconscient est possible car la conscience est un « état » qui se
limite à la vigilance dans l’action, laissant ainsi la place à un inconscient
qui pour sa part serait à la fois non-actuel et non-agissant. Une sorte de
mémoire qui n’aurait pas pour finalité l’action ni l’efficacité immédiate mais
plutôt une sorte de « récréation » ou le sujet se débarrasse de
l’utile. La coupure entre présent et passé permet de mieux saisir la différence
conscient – inconscient : ce qui n’agit pas peut exister en dehors de
l’action, dans la marge du psychisme, il est le reste qui n’est pas nécessaire
dans le mouvement de choix qu’opère la conscience. Descartes a donné à la
conscience un contour qui excède son champ. En l’assimilant à l’existence plus
aucune intermittence de la conscience n’était possible sans renoncer au statut
même d’homme et de femme. Au contraire la position Bergsonienne permet de
réunir ce qui semblait profondément fracturé : d’une part une conscience
tournée vers l’agir et son autre face qu’est l’inconscient qui se détourne de
l’action car inutile. Le processus de sélection de l’information étant
directement lié au choix. Choisir c’est décidé, le vouloir est un pouvoir,
celui d’orienter le sujet dans ses choix et donc d’éclairer sa volonté – la
conscience est cette pointe qui vient permettre l’action. Ce même souci
pédagogique l’anime encore lorsqu’il exprime qu’ainsi « nous aurons moins
de peine » à concevoir l’inconscient. Comme si rassurer le lecteur devant
l’audace de la démonstration était fondamental tant la « répugnance »
à laquelle faisait référence l’auteur était si forte qu’elle empêcherait
autrement la formulation d’une coexistence entre la conscience et
l’inconscient. La force de la démonstration de Bergson visant à rendre
impuissant cet inconscient pour son lecteur afin que sa pensée ne soit plus si
dérangeante et ainsi la rendre possible et audible.
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