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mercredi 24 octobre 2012

La loi est-elle un obstacle à la liberté ?


                                     
CORRECTION

La loi est-elle un obstacle à la liberté ?
Introduction :
A la question « la loi est-elle un obstacle à la liberté » nous serions d’abord tentés de répondre que la liberté ne peut se définir que comme le fait de n’être soumis à rien d’autre que sa propre volonté. En ce sens[.1]  la loi est bien un frein sinon un obstacle à la liberté puisqu’à ma volonté. Ainsi la loi comme ce qui s’impose à tous est d’abord un empêchement d’agir pour chacun. Cependant  dans le cadre d’une vie en société il y a nécessairement des règles qui doivent s’imposer afin de rendre l’existence ensemble possible. Accepter la présence de la loi c’est peut-être alors fonder une liberté réelle, qui prend en compte des limites à la volonté individuelle, la liberté totale étant valable pour tous elle rend aussi incertaine ma sécurité et plus loin mon existence. Car vouloir agir sans borne suppose qu’autrui le puisse aussi.
Nous verrons dans un premier temps
[.2]  que l’exercice de la liberté est celui de ma volonté, la loi agit comme une borne qui empêche le développement de ma puissance d’agir. Mais il nous faudra reconnaître que la loi est aussi le meilleur moyen pour garantir à tous l’effectuation d’une liberté réelle qui comprend une forme de sécurité. Cette sécurité apportée par la loi est alors le premier moment du développement de soi, la loi n’est plus un obstacle elle est au contraire le moyen de ma liberté. La liberté se comprenant seulement par une intériorisation de la loi qui est en moi la présence de la reconnaissance d’autrui.

Plan détaillé :
1 /       La loi est une limite à ma liberté, être libre = agir seulement par soi-même.
A          La liberté est un fait d’expérience, la liberté totale est ce moment où je décide entièrement de mes propres orientations, chacun de mes choix est un fait de ma conscience. Mais cet état est aussi celui du débordement des désirs, être libre = faire seulement ce que je veux.. mais on peut s’interroger ici sur la valeur de ce moi qui n’accorde aucune place à autrui ? En fait l’affirmation de la liberté permet aussi de rejeter la « mauvaise loi », cad l’obéissance aveugle à une loi qui est injuste.
B          Il y a donc[.3]  deux façons de considérer la loi comme un obstacle : 1° parce que j’affirme la toute puissance de ma volonté en dehors d’une organisation sociétale. Nous sommes ici dans une forme d’état de nature ou le terme de liberté lui-même pose problème car la conscience individuelle dans ce cadre est absente. 2° parce que la liberté peut se trouver dans le rejet de la loi, refuser une loi injuste ou une limitation des libertés publiques étant alors le gage de la liberté. Mais ici il y a une torsion du sens de la loi qui  devient l’arme d’une puissance individuelle ou d’un système.
C          En ce sens l’idéal de la volonté c’est l’autonomie (auto – nomos) être guidé seulement par sa propre loi. C’est l’extériorité de la loi qui est un frein à la liberté, son intériorisation permet au contraire d’être son propre maître.  Dans chacun des 2 cas il y a une erreur de raisonnement 1° la liberté n’est pas présente dans « l’état de nature » ni non plus le bien et le mal, nous sommes en deçà d’une décision libre car l’homme en cet état est du côté de l’animal, il agit spontanément sans une réflexion la validant 2° c’est la nature même de la loi qui est tordue, elle devient un instrument de puissance et non plus d’égalité et d’universalité.
2/        la loi est aussi le meilleur moyen pour garantir à tous l’effectuation d’une liberté réelle qui comprend une forme de sécurité. Cette sécurité apportée par la loi est alors le premier moment du développement de soi, la loi n’est plus un obstacle elle est au contraire le moyen de ma liberté
            A          il faut encore revenir sur le statut de la loi, elle est ce qui à partir d’une expérience individuelle ou locale prend une forme universalisable, la loi prend donc la forme de l’universel et par extension elle s’applique à tous et à tout. Mais alors que dans le champ des sciences « dures » la loi ne pose apparemment pas de problème, la chute des corps est un phénomène que chacun peut expérimenter et valider par sa propre expérience, il en va autrement dans le domaine politique où la loi ne peut-être que le fruit d’un accord provisoire et incertain. C’est aussi la différence Thesmos Nomos pour les grecs ou la loi des dieux domine celle des hommes. Mais en plaçant du côté des dieux des lois c’est l’univers entier qui est borné par les lois, il ne peut plus s’agir de vouloir y échapper ce qu’il faut c’est les accepter (thesmos) ou les comprendre (nomos)
            B          l’imperfection des lois humaines[.4]  vaut mieux que le chaos de l’état de nature. Hobbes pose ainsi que le pacte d’association qui sera appelé pacte de soumission par Rousseau est le seul moyen pour quitter l’insécurité radicale et de rentrer dans un cadre qui assure d’abord à chacun sa propre survie. Pour cela la loi peut-être d’abord injuste ou tyrannique car elle se cristallise en une seule main (le tyran) qui doit assurer la sécurité de tous. Un mécanisme de désobéissance est  possible si le tyran ne parvient pas à assurer cette sécurité. Puis l’utilité se fait jour et vient modifier l’appréhension de la loi comme des formes de gouvernements.

            C          La dialectique du maître et de l’esclave chez Hegel est ce moment de retournement exemplaire où le droit se trouve toujours déjà du côté de l’esclave alors que le maître est seulement une bête. (il faut ici développer et exposer complètement  son mécanisme sans oublier la question posée). Il faut prendre soin de ne pas confondre indépendance et autonomie.

3/        Cette sécurité apportée par la loi est alors le premier moment du développement de soi, la loi n’est plus un obstacle elle est au contraire le moyen de ma liberté. La liberté se comprenant seulement par une intériorisation de la loi qui est en moi la présence de la reconnaissance d’autrui.

            A          La liberté ne peut plus se comprendre ne dehors de la loi, sinon nous sommes du côté « de la bête blonde qui soudain tue, pille, viole » Nietzsche. Il faut comprendre la loi comme la chance de la liberté car elle lui donne un cadre et un champ qui n’est plus celui de la personne individuelle mais du groupe et plus loin de l’universel. Ici on peut dire que la liberté ne se mesure pas à ma seule activité et conscience mais au contraire dans un regard vers autrui qui me renseigne sur ma propre liberté. C’est seulement si autrui est libre que je peux l’être. Autrui est la condition de ma liberté et son occasion.
            B          Antigone est libre car la loi des dieux se fond avec sa propre volonté. Il ne s’agit pas de défaire l’individu mais de penser une liberté collective comme condition de possibilité de la liberté individuelle. C’est le drame des personnes emportées par l’histoire, lorsque la situation collective est trop forte l’individu ne peut plus que tisser sa liberté dans un cadre historique qui le dépasse. Cette sécurité apportée par la loi est alors le premier moment du développement de soi, la loi n’est plus un obstacle elle est au contraire le moyen de ma liberté. La liberté se comprenant seulement par une intériorisation de la loi qui est en moi la présence de la reconnaissance d’autrui. Etre jeune en 1939 engage une autre réalité et d’autres choix qu’aujourd’hui. Sartre disait que cette période était justement celle de la plus grande liberté car le choix devient alors crucial – et il ne s’agit pas de choisir entre la loi et son absence mais entre l’humanité et son absence.
            C          La loi est le moyen de ma liberté lorsqu’elle promeut l’homme partout où il se trouve. Vercors met en avant cette profonde humanité de la liberté qui est aussi une promesse de bonheur, reconnaître en chacun l’humanité tout entière et non pas penser que l’humanité peut exclure d’elle-même la plus grande partie du genre humain. Lorsqu’un enfant souffre par la volonté des hommes c’est en un sens l’humanité qui est détruite, et la liberté n’est plus que le nom donné à cette volonté de rétablir sans cesse la loi des justes, de ceux qui pensent que seule la loi peut nous prémunir contre les maîtres en ayant toujours cette vigilance face à ce qui s’’énonce comme libérateur.

conclusion
[.5]  :
La liberté n’est pas l’ennemie de la loi, il y a finalement une forme de transitivité de la loi et de la liberté dans le cadre des sociétés démocratiques. C’est d’une décision des hommes que dépend la définition de la loi et son champ d’application, on évoque souvent les droits de l’homme comme le moment inaugural d’une liberté pour tous et chacun mais il s’agit bien d’une forme juridique qui se forme par des articles et des lois. Exemple de l’accord parfait entre la culture des hommes et la nature des sentiments.


 [.1]Il faut partir du sens commun puis montrer le pb que la réponse immédiate soulève.

 [.2]La mise en place du plan est rigoureuse, il faut préciser l’angle d’attaque de la question et montrer la cohérence d’un propos qui est chainé.

 [.3]Nous choisissons cet angle d’attaque mais nous pourrions partir dans la direction d’une opposition liberté absolue (dans cette partie 1) puis de la liberté déterminée en montrant que la liberté déterminée suppose la reconnaissance implicite de la loi comme ce qui permet d’atteindre une fin par un principe d’action mécanique : une cause engage un effet et seul. Dans ce cas la liberté est la reconnaissance de la loi et son moyen d’effectuation.

 [.4]Il y a un moment d’interrogation sur le statut de la loi qui correspond aussi à une exploration de la loi dans le domaine scientifique et non plus seulement politique.

 [.5]Une brève conclusion permet de récapituler les acquis et d’ouvrir vers un pan non encore traité, une fenêtre.

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