Philosophie

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mardi 7 juin 2022

la technique : axiologie

 

La question de la neutralité axiologique des techniques se pose : les techniques sont-elles bonnes ou mauvaises par définition ou par l’usage que nous en avons ? Nous rencontrons deux écoles : les technophobes qui pensent que la technique est par essence dangereuse. Et les technophiles qui pensent que tout progrès viendra des techniques. Une école paranoïaque qui pense la technique du côté d’un usage malveillant et de l’autre une position angélique qui voit dans la technique l’unique moyen pour améliorer l’Homme. Ce que nous pouvons constater c’est la place que les techniques occupent aujourd’hui au sein de nos sociétés. Ici, il y a un abus de langage car les techniques ne vont pas seules, elles accompagnent les sciences. Autrement dit on parle de progrès des techniques là où il faudrait adéquatement parler d’un progrès des sciences.

L’environnement technique ne peut être qu’un environnement global. La critique des techniques vient du fait qu’elle absorbe tout environnement qui fonctionne en mode autonome. Elle met en place des relais techniques. Les frigidaires supposent une centrale produisant l’électricité, une centrale hydraulique, puis le transport de l’énergie qui suppose des infrastructures terrestres comme des routes, des ponts, ainsi qu’une surveillance de ces installations de ces réseaux et transports. Bref nous passons d’une économique d’auto-subsistance à une autonomie capitaliste qui parallèlement va mettre en place un marché. Il est intéressant de noter que les physiocrates prennent en modèle la circulation des eaux comme exemple de circulation de la monnaie. Autrement dit, ils pensent une autorégulation de la circulation des flux monétaires. Ils prennent la nature comme le modèle du développement du marché. C’est le model du « laissez faire, laissez agir » qui signifie qu’il y a spontanément une adaptation du marché aux circonstances. Il ne faut pas intervenir, en ce sens, les physiocrates sont au plus loin de l’Etat providence.

Etat providence = Il nait au moment des 30 glorieuses au moment de l’essor industriel ou la classe ouvrière va s’enrichir et obtenir des droits. Ils sont ceux des congés payés, d’une couverture maladie, finalement, l’Etat prend en charge l’assistance aux individus. C’est aussi le moment de l’assurance chômage ou l’Etat met en place des aides s’il y a rupture de contrat de travail ou si l’individu n’est pas en situation de pouvoir travailler (extrême précarité, handicap ...). L’Etat pourvoit donc aux besoins des individus. Ici, on pourrait dire qu’il y a une spécificité française car l’Etat français est celui qui assure le plus haut taux d’assistance aux individus dans le monde. Mais, cette position va à l’encontre de la position libérale. Adam Smith parle ainsi d’une « main invisible. » Une main qui viendrait donner les cartes, laissant penser qu’il y a du hasard alors même que cette main connait les cartes distribuées. Cette main invisible régule le marché. En fait chacun vise son bien-être, son confort et agit ainsi par égoïsme. Adam Smith dira ainsi dans « La richesse des nations » : « On n’attend pas du boucher qu’il vende une bonne viande par bienveillance mais par égoïsme. » En effet, si le boucher vend de la bonne viande, c’est pour que le client revienne chez lui. Il agit donc dans son intérêt qui est compris par les autres comme de la bienveillance. En fait il y a transformation de l’intérêt égoïste en intérêt général par une alchimie qui est celle de la main invisible car finalement tous les intérêts égoïstes finissent par devenir de l’intérêt général. Ainsi le chef d’entreprise qui décide d’implanter son usine sur le sol national le fait parce qu’il diminue ainsi les frais d’implantation sur un autre territoire. Il profite de la main d’œuvre existante. Sa faisant il enrichit le produit national brut et ainsi le revenu global des travailleurs. C’est donc bien pour s’économiser des frais que l’entrepreneur capitaliste travaille au développement de l’intérêt national. Mais, cette position d’une transformation de l’intérêt égoïste en intérêt collectif dépend totalement des infrastructures et des environnements. Dans une économie globalisée l’intérêt du producteur capitaliste est plutôt du côté de la délocalisation : les coûts de transport étant devenus bien plus faible, et le coût du travail moins élevé sur d’autres territoires. Ainsi on voit une fuite del’industrie vers les pays en voie de développement. Cela semble donc contredire l’intérêt collectif mais il faut replacer la main invisible dans un contexte non plus national mais mondialisé. On assiste à une perte d’emploi dans les pays industrialisés mais a une augmentation significative des revenus dans les pays émergents.

On voit aujourd’hui une transformation très sensible du rapport aux techniques qui engage aussi un rapport différent au politique. Auparavant, les décisions politiques pouvaient régler les différences économiques. Nous étions dans ce que l’on nomme dans la politique économique tandis que l’économie politique a pris aujourd’hui le pas. L’influence des techniques fait que la corrélation entre le politique et l’économique n’est plus nationale mais européenne et mondiale.

Nous nous trouvons devant une situation qui dès lors empêche tout mouvement qui serait strictement national. Et simultanément apparaît un raidissement sur des positions de replis qui assureraient à travers la souveraineté politique, la souveraineté économique. Cette vision nommée nationaliste et parfois populiste, repose sur l’idée et peut-être le fantasme d’un retour en arrière vers une économie auto suffisante.

Il y a aujourd’hui une grande défiance envers l’économie comme envers les techniques. Nous avons aujourd’hui une relation schizophrénique aux techniques : nous sommes à la fois dépendant de la révolution numérique tout en prônant un retour à la nature. On voit émerger la volonté d’une production agricole locale en même temps que nous sommes face aux défis de l’alimentation de sept milliards d’individus. C’est la question de la décision qui finalement apparait : Sommes-nous dépendant des découvertes scientifiques et techniques qui prendraient le pas sur nos libertés ou nos libertés sont-elles en capacité de poser des questions indépendamment de ce cadre technologique et d’y répondre ? Le comité d’éthique qui en France statut sur l’évolution de sciences et des techniques, qui a un avis consultatif lors de la découverte du groupe HLA la question a été celle de savoir si on pouvait préventivement demander lors de l’embauche le groupe HLA de l’individu. Celui-ci permet d’obtenir des statistiques de probabilité de développement de pathologies et maladies. Le comité a ainsi interdit l’usage privé à l’embauche du groupe HLA comme il a pu décider d’un moratoire sur la culture des cellules souches. Mais pendant ce temps, la recherche a continué outre atlantique mettant la France en situation de ne plus être à la pointe de la recherche dans ce domaine. Ce qui signifie que chaque découverte scientifique entraine mécaniquement son usage et que la réflexion sur les sciences et techniques est toujours en retard par rapport à ses découvertes. Bachelard dira ainsi « la science n’a pas la philosophie qu’elle mérite. » L’extrême spécialisation fait aujourd’hui qu’il est impossible de prendre un recul suffisant par rapport aux découvertes. Claude Bernard, biologiste, président du comité d’éthique, pour réfléchir sur l’évolution des sciences à l’évolution des sciences quitte son laboratoire et ainsi la recherche fondamentale. La GPA est ainsi interdite en France au nom de l’intégrité physique et de la propriété du corps (incessible, indivisible.) Mais des femmes y ont recours en dehors du territoire national. Un arrêt de la cour de cassation de juillet 2018 pose que dans ce cas, l’enfant prendra la nationalité et l’identité de ses parents administratifs. Cette décision est prise au nom des droits de l’enfant mais dans les faits, cela permet une GPA active. La technique est aujourd’hui au centre de tous les regards. Orwell décrit un monde ou (1984) la surveillance devient géométrale « Big Brother is watching you. » Cette prévision se révèle fausse ; La menace est bien plutôt du côté des « Small Brother », il ne s’agit pas d’une volonté centrale mais d’un éclatement technique qui fait que chacun d’entre nous livre la totalité de ses informations privés par le biais de cartes de fidélités, des réseaux sociaux, des clics sur internet, des éléments confidentiels sur téléphone portable (empreintes, iris ...) qui conduisent à pouvoir cernés techniquement un individu et extraire de 80 à 95 % de ses des données privés.

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