Philosophie

Mise à disposition d'un matériel permettant de travailler les cours de philosophie.

dimanche 15 septembre 2013

Dissertation temps / langage

S1    T-L : Le temps est-il la forme de mon impuissance ?
S2    T-ES : Le langage ne fait-il que rassembler les hommes ? 
                                    




Conseils et biblio :



Pour le 1er sujet il s'agit de déterminer si le temps est l'obstacle principal à ma liberté. Alors que j'ai un pouvoir sur les choses, que je peux aussi agir sur autrui, je suis démuni face au temps qui inexorablement passe. Il faudra dans le sujet prendre garde à l'expression "la forme de". N'est-ce pas justement cette mise en "forme" du temps qui crée ce sentiment d'impuissance? La forme appartient au champ de la physique qui est celui justement de la puissance mais n'est-ce pas le "pliage" du temps sur la physique qui provoque un sentiment de désarroi - il existe un temps mathématique qui permet le calcul, la prévision, le retour : face à l'inexorable pourtant il s'efface, devant la mort mais aussi devant l'empire des sentiments et des passions.  Ce sont ces pistes qu'il faut d'abord explorer.

Biblio :

Bergson,  Essai sur les données immédiates de la conscience
Sartre, L'Être et le Néant
Pascal, Les pensées
Saint-Augustin, Les confessions
Kant, Critique de la raison pure, Esthétique transcendantale, § 1 à 6
Husserl, Méditations cartésiennes
Heidegger, Être et temps
Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception


Sujet 2

Il s'agit de comprendre le rôle joué par le langage dans la construction de la société. Est-il essentiellement facteur d'union entre les hommes ou au contraire engage t'il une division et une rupture? Est-il union autour d'une langue, et dans ce cas n'entraîne t'il pas l'incompréhension envers les autres langues et hommes? Le langage construit-il un sentiment d'appartenance à un groupe qui conduit paradoxalement à la discorde et à la désunion entre les hommes ? Le langage d'outil de communication peut-il se transformer en instrument de guerre? Quel est le poids des mots, peuvent-ils associer les hommes et à la fois les diviser ? Ex. de la tour de Babel qui devient le symbole d'une prolifération des langues pour briser la volonté de puissance des hommes : Dieu donne aux hommes les langues d'abord pour empêcher qu'ils ne s'associent et se rassemblent et ainsi menace son règne. 

Biblio :

Austin, Quand dire c'est faire.
Michel Foucault, Les mots et les choses
BenvénisteProblèmes de linguistique généraleBourdieu PierreLangage et pouvoir symbolique Ce que parler veut dire
CassirerEssai sur l'homme   et     Cassirer, La Philosophie des formes symboliques, Tome 1 : Le langage, Editions de Minuit.
Chomsky, Le langage et la pensée, Petite Bibliothèque Payot.
Jakobson, Essais de linguistique générale, 
Merleau-Ponty, Signes
MontaigneEssais
PlatonCratyle
RousseauEssai sur l'origine des languesSaussure, Cours de linguistique générale


Il s'agit d'un premier devoir où la connaissance technique du devoir n'est pas encore requise, il faut cependant prendre soin de traiter la question posée en lui donnant toute l'importance possible. Les termes supposent une analyse et il faut modifier l'angle de traitement en jouant sur les sens de la question et ses renversements. 

Vous trouverez par ailleurs une autre dissertation sur le temps et l'existence dans les archives du blog

vendredi 28 juin 2013

Epicure, Lettre à Ménécée - préparation de l'oral



Epicure, Lettre à Ménécée

Epicure est né en 341 av. J-C. Le monde qu’il découvre est en ruine car Athènes a perdu en 338 av. J-C, la bataille de Chéronnée, contre les Perses et du même coup, son indépendance. De plus, Epicure vient de l’île de Samos qui n’est pas considérée comme faisant véritablement partie de la Grèce. De plus, la famille d’Epicure est très pauvre. C’est pourquoi, la philosophie d’Epicure ne s’intéresse pas à la politique, c’est-à-dire au bonheur collectif mais au bonheur individuel. Toute son œuvre (œuvre de toute sa vie), répond à une seule question : comment faire pour être heureux ? La philosophie n’est donc pas pour lui la recherche de la vérité (comme Socrate), ou du pouvoir (comme les sophistes) mais uniquement le moyen d’être heureux.

1er paragraphe [122]

Dans le début de la Lettre à Ménécée, Epicure s’oppose aux sophistes et à Socrate, pour qui la philosophie est destinée à une période spécifique de la vie :
-La jeunesse pour les Sophistes
-L’âge mûr pour Socrate
Cette distinction s’explique par le but que l’on assigne à la philosophie :
-la gymnastique de l’esprit pour les sophistes
-la recherche de la vérité pour Socrate
Pour Epicure en revanche, le but de la philosophie est d’aider les hommes à être heureux et donc elle est destinée à tout âge de la vie puisque l’homme cherche toujours le bonheur. Elle va agir de deux manières différentes pour procurer le bonheur ; d’une part aux vieillards et d’autre part aux jeunes. Ce qui peut attrister les vieux, c’est que leur état physique les empêche d’obtenir les plaisirs qui étaient les leurs auparavant. Mais la philosophie leur apprend à pratiquer la remémorisation, c'est-à-dire à revivre le plus précisément possible les moments heureux de leur vie ; il ne s’agit pas de se souvenir et de souffrir du passé perdu, mais bien de revivre dans le présent ce bonheur. Ainsi, les vieux restent jeunes parce que le plaisir continue à faire parti de leur existence. Pour les jeunes, il y a quatre choses qui les empêchent d’être heureux :
-la peur de la mort
-la peur des dieux
-la peur de la souffrance
-l’incapacité de faire la différence entre les désirs naturels et les désirs vains
La philosophie va donc proposer un quadruple remède (tetrapharmakon) à ces maux. Il va commencer par récuser (prouver que ce n’est pas fondé) la peur des dieux
.
2ème paragraphe [123]

Le premier élément du quadruple remède est la lutte contre la peur des Dieux. Nourris de récits mythologiques, les contemporains d’Epicure vivent dans la peur que les dieux interviennent dans leur vie et leur volent les choses auxquelles ils tiennent. Epicure va opposer à cette crainte une conception des dieux rationnelle. Comme toujours, il va partir d’une conception commune : les dieux sont perçus comme immortels et bienheureux. Par la mesure où ils sont immortels, ils ont l’éternité devant eux, ils ne vivent pas dans la même temporalité que les êtres humains et ils ne vont pas intervenir dans leurs petites vies brèves et insignifiantes. L’immortalité les délivrent aussi de la peur de la mort et donc du besoin de se divertir pour ne pas y penser. Les dieux sont également autosuffisants, c'est-à-dire bienheureux, sans manque, sans crainte, sans désir. Un être bienheureux n’a aucune raison d’aller voir ailleurs, il se suffit à lui-même. Epicure s’oppose donc radicalement à la conception vulgaire que véhiculent les récits mythologiques. Ceux-ci donnent des Dieux une image impie (hérétiques) en faisant des dieux des hommes plus puissants mais jaloux, bagarreurs, vengeurs, pervers,… comme les hommes.
 Epicure limite donc considérablement les interactions possibles entre les dieux et les hommes. Ils n’ont pas de préoccupation commune, ils ne vivent pas dans le même temps, et ni dans le même espace. Les hommes vivent dans un monde clos avec différents planètes au sein duquel le nombre d’atomes ne change jamais. Il existe d’autres mondes clos, dont on ne sait rien. Les dieux vivent entre ces mondes, à l’extérieur d’eux, dans les espaces inter mondains. On voit donc à quel point Epicure ne garde des dieux, une idée rassurant ou du moins non inquiétante largement vidé de contenu ; il ne formule pas d’hypothèses que les dieux pourraient ne pas exister car elles déstabiliseraient ses contemporains. Il en fait des modèles à imiter et la dernière phrase de la Lettre à Ménécée est : « tu vivras comme un dieu parmi les hommes »

3ème paragraphe [124]

Epicure s’attaque maintenant à la peur essentielle qui hante les hommes ; la peur de la mort. Son argumentation repose sur sa conception atomiste de la sensation. Nous ressentons du plaisir ou de la douleur parce que nos atomes se touchent entre eux et nous transmette cette information. Quand nous mourons, nos atomes se séparent et instantanément, plus aucune sensation n’est possible. Or dans la conception sensualiste d’Epicure, seul ce que nous sentons existe. Donc, en l’absence de sensation, rien n’existe et donc la mort n’est rien pour nous. Epicure répond ensuite à différentes conceptions erronées de la vie et de la mort :
-Il répond à ceux qui disent « la mort n’est pas douloureuse, mais son attente l’est ». Cette position est stupide ; pourquoi l’attente de quelque chose qui ne fera pas souffrir devrait-elle faire souffrir ?
-Fuir la mort comme le pire des maux : la mort n’est pas un mal, pas une souffrance ; la mort n’est rien pour nous.
-Désiré la mort comme la fin des maux de la vie : c’est en parti la conception de Socrate. Au contraire, pour Epicure, seul la vie existe pour nous ; nous pouvons la rendre agréable et souhaiter qu’elle s’arrête, c’est souhaiter avoir moins de plaisir.
Il montre de la colère à l’égard de ceux qui disent qu’ils attendent la mort avec impatience ; si c’est le cas, pourquoi ne se suicident-ils pas ?
Pour finir, il compare la vie à un repas : ce qui importe, ce n’est pas la longueur du repas et la quantité de nourritures, mais la qualité et le plaisir  de celui-ci.

Transition : Apres avoir montré que la peur de la mort n’a aucun fondement, Epicure devrait s’attaque à la troisième peur qui nous empêche d’être heureux : la peur de la souffrance. Cette peur est beaucoup moins importante pour les contemporains d’Epicure que pour nous. En effet, à son époque, les hommes étaient habitués a souffrir sans pouvoir être soulagé. Ceux qui survivaient à la maladie étaient très résistants à la douleur. De plus, l’absence de médicaments abrégeait la durée des maladies, soit on guérissait tout seul rapidement, soit on mourrait tout aussi rapidement. Enfin, la philosophie d’Epicure fournit une arme contre la souffrance, la même que contre la vieillesse. La remémoration des moments heureux de notre existence permet de vivre des choses joyeuses quel que soit notre âge et notre état de santé. Epicure a répondu a la peur de la souffrance dans d’autres textes (Lettre a Pythoclès), il va maintenant s’attaquer au quatrième élément du quadruple remède : la distinction entre les désirs naturels et les désirs vains.


Dans ce paragraphe, Epicure va établir une classification des désirs. Celle-ci répond aux besoins de distinguer les désirs susceptibles de nous procurer du bonheur de ceux qui ne nous apportent que de la souffrance. Il est très important de comprendre que le jugement d’Epicure n’est pas moralisateur : aucun désir n’est mauvais en lui-même, ce qui est important, c’est sa capacité à nous donné du bonheur en nous. Les désirs vains sont des désirs contraires aux lois de la nature et donc impossible à réaliser comme le désir de l’immortalité ou de ne pas vieillir. Ils ne peuvent donc nous procurer que de la souffrance et c’est pourquoi il faut les éviter et si possible les déraciner. Au contraire, les désirs naturels suivent le cours de la nature et sont donc faciles à satisfaire car pour Epicure, la nature est bonne. Outre la satisfaction des besoins vitaux, le plaisir peut-être obtenu par une nourriture plus varié ou par la pratique de l’amitié et de la philosophie. A ses désirs nécessaires s’ajoutent des désirs naturels qui varient selon les individus (sport ou art). Avant d’agir, il faut se demander si le résultat de notre action nous procurera plus de bonheur ou plus de souffrance. La philosophie des plaisirs d’Epicure repose donc sur une économie des plaisirs dur un balance risques/bénéfices : même si le vin est agréable, il vaut mieux s’abstenir d’en consommer avec excès car les conséquences négatives seront supérieures au plaisir ressenti, de la même façon, il vaut mieux s’habituer à manger des choses simples et profiter exceptionnellement d’un bon repas afin de ne pas souffrir de l’absence de quelque chose de difficile à obtenir. Le plaisir est donc le principe et le but de la vie heureuse et la boussole qu’il doit nous guider avant toute action. Pour autant, tout plaisir n’est pas un bien et toute souffrance n’est pas un mal. Par exemple, la pratique sportive, nécessite l’acceptation d’une certaine souffrance pour obtenir un vif plaisir. Il ne faut donc pas poursuivre n’importe quel plaisir ou fuir n’importe quelle souffrance mais bien analyser les avantages et désavantages de chaque chose.

Ainsi, Epicure a conclu sa présentation du quadruple remède, en ne présentant que trois remèdes. Son lecteur est désormais capable de vivre sans trouble physique ou morale ; Epicure appelle ça l’ataraxie. A partir de ce moment, il va pouvoir proposer des ajouts à cette absence de troubles. Dans le deuxième parte du texte, il va expliquer comment procéder pour ne pas perdre cette tranquillité et obtenir des satisfactions variées. Contrairement à la réputation qui lui est faite, Epicure ne prône pas la débauche mais au contraire l’autosuffisance et la prudence. L’accusation d’ivrognerie et de gloutonnerie portée par les contemporains d’Epicure mais aussi par les philosophes des siècles qui suivront vient sans doute du fait qu’il est un philosophe matérialiste et hédoniste ce qui scandalise la tradition idéaliste dominante dans l’Europe occidentale (idéalistes : Kant, Platon, Descartes,…)
Epicure revient sur son éloge de la frugalité. Il ne faut pas le confondre avec la valorisation socratique ou religieuse qui consiste à mortifier le corps par mépris de celui-ci. La frugalité d’Epicure permet le bonheur du corps en lui procurant la satisfaction régulière et facile de ses besoins, sans le soumettre aux inquiétudes liées au changement de fortune. Il faut accepter le bon repas occasionnel et non pas si accoutumer d’autant plus qu’une nourriture légère permet et favorise notre dynamisme et notre santé.

Dans le paragraphe suivant, il répond clairement à l’accusation de débauche en montrant que la vie selon le plaisir est liée à la prudence et non à l’excès. Il explique clairement qu’il ne recommande pas l’excès d’alcool, de nourriture ou de sexe qui finissent par avoir l’effet inverse de ce qui est recherché : de la souffrance et non du plaisir, et conduire à la souffrance et au trouble de l’esprit. Comme Aristote, Epicure affirme que la prudence est le plus grand des biens. C’est grâce à elle, que nous gouvernons notre vie de façon agréable.

A partir du cours d'un élève