Philosophie

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lundi 6 juin 2022

L'art, le Beau

 


L’art, le beau, l’esthétique 

Introduction :

L’art n’a pas toujours eu la signification qu’il a aujourd’hui. Il est d’abord à destination des Dieux et des maîtres. Sa première forme, avec l’art rupestre, engage un rapport magique et conjuratoire aux animaux et à la nature. C’est ce même rapport que l’on trouvera dans l’Antiquité lors de l’édification des temples et de la statuaire qu’il l’accompagne. En d’autre fois, l’art est la démonstration du pouvoir du roi, il est la mise en forme de sa puissance, de sa richesse. Alors l’artiste a lui-même un statut très différent. Il est inspiré par les Dieux, c’est-à-dire qu’il est le réceptacle d’une volonté qui lui est étrangère : il est habité par un démon. C’est le statut de l’art lui-même qui est en cause. Les Grecs distinguent entre les arts serviles et les arts libéraux : cela regroupe la division entre arts manuelles et les beaux arts considérés comme les arts de l’esprit. Les beaux arts comprennent la grammaire, les mathématiques, l’architectures. Des éléments donc qui ont avoir avec ce que nous appelleront la raison. la gymnastique en fait parti car elle sculpte le corps en même temps que l’âme. Les arts serviles comprenant au contraire tout les m »tiers de l’artisanat, toutes les activités qui ont avoir avec la matière. L’artiste est donc positionné dans un entre deux, comme le sculpteur il peut avoir à faire avec la matière mais en même temps il produit quelque chose qui est indépendant de sa volonté mais que lui seul peut accomplir. L’artisan est dans la reproduction des savoirs faire, dans un geste technique tandis que l’artiste produit une geste qui est mouvement globale, œuvre totalité achevé dans l’acte même du dire. On peut produire une histoire de l’évolution du concept de beauté. D’abord, nous l’avons souligné, l’art est à disposition des Dieux ou des Princes. Ici nous sommes dans le registre de la conception métaphysique du beau. Cette métaphysique (au-delà du beau), on la trouve incarnée dans La théorie des idées chez Platon. Toute chose renvoie à son concept. Le concept est donc achevé ou pleins tandis qu’une chose est toujours imparfaite. Il y a plus dans l’idée que dans la chose. Ainsi l’idée du beau est forcément supérieur à toute œuvre finie. Si le concept est le lieu de la beauté, la beauté renvoie alors à la notion de perfection. Mais alors, le beau se confond aussi avec le bien. Platon dira ainsi qu’ « une belle marmite est une bonne marmite », c’es-à-dire que c’est une marmite qui permet de faire une bonne soupe. Cette confusion entre beau et bien conduit à introduire la notion de perfection qui appliqué à l’œuvre d’art sensible suppose un rendu extrêmement précis du modèle : nous sommes dans un art imitatif et en même temps cela construit une image dévalorisée de l’artiste qui nécessairement ne peut faire qu’imiter la nature. Celui qui peint des raisins si parfaits que les oiseaux si trompent et viennent picorer la toile : celui-là imite la nature mais ne l’égale pas, ce qui manque aux raisons c’est la vie. Cela conduit aussi à une métaphysique du beau où le ressort de la beauté est finalement indiquée par l’œuvre sans y être déposée. La beauté de la représentation du Christ n’est que le pâle reflet de sa beauté réelle. La souffrance représentée par ses raits du visage lorsqu’il est placé sur la croix, n’est que le pâle reflet de son sacrifice. Si la vérité est ailleurs, la beauté aussi. A partir du XVIème siècle, on va couper le beau du bien, on va lentement se mettre à penser qu’il y a une valeur du beau qui ne tient pas au concept de perfection. On va réfléchir le rapport de l’art à lui-même. On va s’interroger sur ce qui constitue le beau dans l’œuvre d’art et plus encore, on va commencer à penser que le beau c’est l’indéfinissable dans l’art. La perfection technique ne renvoie pas forcément à la beauté : la bonne marmite peut être laide et inversement un objet peut être beau sans aucune utilité. Finalement, on commence à extraire le beau de la nature. Le beau prend une indépendance dans sa construction : il n’est plus lié à une forme sensible mais il peut représenter, par exemple, une émotion. Plus loin encore, au XIXème, le beau s’affranchira du beau lui-même. Le laid peut-être considéré comme beau. Cette rupture, Victor Hugo dans La préface à Cromwell en fait l’éloge comme il l’a mis en scène dans le premier chapitre de L’homme qui rit. On y voit un jeune garçon qui marche sur la lande dans la tempête. Il y croise des ombres noires suspendues à des arbres : ce sont autant de macabres lampadaires, des pendus goudronnés placés à chaque lieue pour faire peur aux braconniers. Il y a dans ce spectacle, l’expression d’une beauté que Victor Hugo revendique à l’intérieur du beau lui-même. 

I- Le jugement de goût 

A-    Le je ne sais quoi de l’esthétique classique

La beauté à nécessairement à voire avec sa perception possible. Celui qui peut dire une œuvre belle, ne le dit que parce qu’il la perçoit grâce à son goût. Le goût serait donc une faculté. Pour la conception classique, présente jusqu’au XVIème - XVIIème , cette faculté est naturelle. Si certains hommes sont nés pour dominer alors ce sont eux qui disposes de la faculté de dire le beau. Or, s’ils peuvent dire le beau c’est parce qu’ils connaissent le bien, c’est parce qu’ils sont naturellement aptes à reconnaitre le bien du mal qui peuvent juger du beau et cette position esthétique, légitime, cette position politique : les aristocrates ont seuls cette faculté, elle est innée, donnée par Dieu, elle s’inscrit dans un droit naturel qui les rend supérieur du point de vu de la reconnaissance du bien et donc de leur aptitude à gouverner. Or, cette capacité ne peut-être acquise que par convention. C’est la privation de l’éducation des autres classes qui empêche toute libération qu’elle soit politique ou esthétique. Le goût est pensé par l’aristocratie comme un outil de domination. La privation d’éducation a pour effet une forme d’atrophie de la pensée qui renvoie finalement à un objectif politique. Cela nous apprend aussi que l’esthétique n’a pas qu’une fonction esthétique. Bourdieu (sociologue) écrit son essai sur l’héritage (1970) où il montrera finalement la reproduction des classes sociales qui est encore en grande part présente dans un gouvernement pourtant républicain et démocratique. Seulement 7% des enfants des classes populaires iront dans les grandes écoles. Or le système scolaire tend vers l’égalité, ce qui laisse à penser que l’évaluation ne mesure pas seulement des savoirs objectifs mais aussi des éléments culturels dissimulés qui ont avoir avec des connivences esthétiques liées aux représentations cultuelles des enseignants.

B-    Kant : qu’est-ce que le beau ?

Dans La critique de la faculté de juger, Kant s’intéresse au jugement esthétique. Le terme même de jugement concernant l’esthétique ne va pas de soi. Le jugement suppose une pesée, une mesure, un acte rationnel. L’esthétique renvoie à aïesthesis qui renvoi lui-même à la sensation perçue par nos sens, à l’organisation de ces sens, à leurs complexions (= assemblages). Ainsi celui qui aime le sucré éprouve du plaisir lorsqu’il mange un gâteau en ne s’interrogeant pas rationnellement sur son pourquoi. Le fait de poser la proximité de la beauté avec un sentiment esthétique, c’est donc déjà posé que la beauté ne va pas pouvoir être saisie rationnellement. C’est pourquoi Kant dans La critique de la faculté de juger, dans sa préface, invente le concept d’héautonomie donc le fait que l’art rassemble à la fois le particulier et l’universel. L’art subsume l’universel sous le particulier. Kant prend l’exemple de la rose : « lorsque je dis la rose est belle, je prétend qu’elle est universellement recevable comme belle », autrement dit j’affirme que mon jugement de goût est partageable, « et si quelqu’un n’est pas d’accord, je lui dénie le goût ». Le beau n’est donc pas une affaire privée. Kant en donnera la formulation complète à travers cette proposition : « le beau est ce qui plaie universellement sans concept ». C’est vers la compréhension de cette formule que nous allons nous acheminer. 

 

 

C-    Les distinctions kantiennes 

 

1)      Beau, bon agréable 

Pour Kant, il faut d’abord distinguer le beau de l’agréable. L’agréable, dit Kant, c’est ce qui me plaît  tandis que le beau c’est ce qui plaît. En effet, tandis que l’agréable ne touche que nos sens et engage avec lui donc un plaisir sensible, le beau fait ressentir un plaisir intellectuel, il engage donc médiatement une réflexion. Or, la réflexion suppose l’accès possible au concept, à l’idée, donc à un élément universel. On peut dire de la même façon que du côté de l’agréable il n’y a rien à dire ou autrement dit à chacun c’est goût, c’est-à-dire à chacun son plaisir (l’un aime le goût sucré, l’autre pas). Kant dira que l’on peut discuter des goûts, c’est-à-dire qu’on peut échanger sur nos différences ou nos proximités d’agréables. Mais, c’est limité par le fait que nous sommes face à une organisation de nos sens qui en même temps ne prête pas à discussion. Ainsi Kant énonce que « de l’agréable on ne discute ni on ne dispute ». il faut prendre le terme de discute et de dispute dans leur sens scolastique. La discutatio représente un échange sans argumentation tandis que la disputatio est une argumentation avec preuve car en effet du beau on peut discuter mais non pas disputer car comme la formule de Kant l’indique : « si le beau est universel, il est pourtant sans concept », c’est-à-dire que nous ne pouvons pas nous entendre sur ce qu’est objectivement le beau. On le défini par des éléments qui eux-mêmes nécessiteraient une explication positive qu’ils ne peuvent fournir (l’harmonie des formes, le style). Kant distingue aussi le beau du bon en prenant d’abord le bon du côte du concept de perfection, ce concept renvoyant lui-même à un cadre technique. Ce décrochage du beau d’avec du bon suppose le décrochage d’avec l’utilité : « l’utile n’est pas le beau » dit Kant et la perfection prend elle-même deux axes : le premier morale, c’est la belle âme qui a, jusqu’au XVIème siècle, fait qu’une forme de déconsidération était liée à l’art sensible qui n’était que le reflet de le spiritualité intérieure ; l’axe technique, lui, suppose des méthodes, une construction technique objective qui ne permet pas dit Kant d’obtenir nécessairement du beau. On peut avoir une technique parfaite qui n’engage pas un sentiment esthétique, autrement dit le beau est toujours ailleurs. Kant propose alors une autre distinction. 

2)     Beauté libre, beauté adhérente  

La beauté adhérente est liée à l’adéquation parfaite de l’objet  à son concept, autrement dit l’objet constituera par lui-même la réalisation du concept général. Si l’on prend le concept de pull, le pull doit remplir des fonctions : il doit être imperméable au froid, au vent, à la pluie. Ainsi le paradigme de pull s’incarne dans le pull marin. Cette imperméabilité, cette résistance à l’air, à l’eau, au vent suppose une laine imputrescible, écossaise, une densité de maillage, une couverture totale du haut du corps. Ici, l’esprit peut être frappée par la réalisation parfaire du pull marin. Mais son concept est finaliste, c’est-à-dire que nous sommes dans une téléonomie, c’est-à-dire dans une réalisation qui suppose une fin : ici, la résistance au vent, au froid. La beauté libre au contraire vise ce qui dans l’objet n’appartient pas à l’objet, ce qui dans l’objet ne remplie aucune fonction : ici, la couleur du pull, le maillage, sa forme. Aussi l’esthétique se donne sans fonctionnalité et sans           . C’est le seul plaisir de la forme, de la couleur qui guide alors le choix.

Mais on comprend aussi la complexité à séparer la technique du beau. Par exemple, lorsque je dis « quel beau cheval » en parlant d’un cheval de course ou d’un cheval de trait, comment séparer le plaisir de la forme de ce qui attendu du cheval. Un cheval de course devra posséder des caractéristiques physiques lui permettant un galop rapide, toute sa forme est à disposition de cette réussite. Si on prend l’exemple de la voiture de course, sa couleur rouge renvoi directement à la marque Ferrari, de même que sa forme profilé, basse aux pneus lisses impliquent une adhérence maximale à des fins de pénétration de l’air. Le bruit du moteur lui-même renvoi sa puissance. Le jugement « quel belle voiture » est donc difficilement distinguable d’une fonction technique, donc d’une beauté adhérente, en même temps que d’un jugement d’appartenance de classe. Il faudrait donc pour énoncer un jugement esthétique pur, que nous soyons capables d’isoler le jugement esthétique non seulement du plaisir ou du déplaisir que j’ai à contempler l’objet mais aussi de la fonction qui l’occupe, de son cadre technique donc en un sens ici l’esthétique commence où s’arrête le plaisir, c’est-à-dire l’agréable et aussi à la fonction c’est-à-dire au cadre technique. 

La question du beau est donc centrale chez Kant. Elle est même, chez Kant, qualifiée de « question originaire ». En effet le beau est pour Kant ce qui nous distingue comme humain. L’esthétique comprend alors l’émotion, la capacité donc à s’émouvoir devant une œuvre mais aussi un sentiment à éprouver de l’affection ou au contraire de l’antipathie. Kant distingue, en effet, trois champs. Premièrement celui de la morale, qui est le gouvernement des pures, des sages où peu d’entre nous y accède. Deuxièmement la science, qui elle fonctionne par lois, par conformité à l’environnement physique : nous sommes là dans le cadre de spécialistes qui parlent la même langue mais qui demeurent eux-aussi dans le cadre restreint d’une communication entre spécialistes. Le véritable lien de communication, celui qui s’établie au quotidien, c’est celui du vivre ensemble qui est notre capacité à nous entendre collectivement sur des éléments esthétiques, autrement dit aussi sur l’émotion.

3)     Beauté naturelle et beauté conventionnelle 

La question originaire croise aussi la distinction entre beauté naturelle et beauté conventionnelle. La beauté naturelle c’est celle spontanément offerte par le spectacle de la nature. Le spectacle (celui de  l’océan, celui d’un coucher de soleil, du désert) s’impose à nous sans questionnement : la question du pourquoi est disqualifiée. Tandis que dans le beau conventionnelle la question de l’intention de l’artiste arrive très rapidement.  Très longtemps le beau naturelle a été supérieure au beau conventionnel, quasiment jusqu’au début du XXème siècle. Par exemple, Manet est le premier peintre à s’être servi de la couleur verte qui sortait du pot. 

4)     Jugement déterminant et jugement réfléchissant 

Kant utilise pour définit le jugement de goût, une distinction celle entre jugement déterminant et jugement réfléchissant. Le jugement déterminant ou apodictique, c’est-à-dire jugement par preuve est un jugement scientifique qui dit ce qu’est l’objet, qui le défini. Au contraire, le jugement réfléchissant est la réflexion du jugement vers sa source, dans ce cas le jugement ne donne pas d’information sur l’objet mais sur moi-même. C’est pourquoi Kant dit que : « ce jugement me juge, je suis jugé par ce que je juge ». 

Kant affirme dans ce texte que la formule : « cela met agréable », ne peut s’étendre au beau. Le jugement de beau a une prétention à l’universelle. Or, cette prétention n’est pas fondée sur un concept objectif. Ici, avant de poursuivre, il faut nous souvenir de ce que Kant dit du beau : le beau est une force vitale, un élan. Lorsque je suis devant le spectacle du beau, je l’éprouve en mon sein comme une émotion qui renvoie à ma force vitale. Lorsque je contemple la beauté, finalement ce qui met proposé à voir, cela met exclusivement réservé. Ici, on doit alors comprendre autrement le jugement réfléchissant : il est réfléchissant parce que l’objet à un effet immédiat sur moi, il me transforme et il ne peut me transformer que parce que l’objet est un miroir, plus encore c’est un mirage. Finalement le spectacle du beau est l’occasion d’une conversion, il s’agit de découvrir en soi ce à quoi l’objet renvoi. On retrouve ici le sentiment de l’existence au moment du choc esthétique. Ce moment n’est pas encore encombré par les calculs de la raison et du sentiment, il est brut : c’est cela que Kant nomme la force vitale. L’œuvre d’art nous permet de nous sentir existés.

Maintenant, nous pouvons comprendre la définition kantienne : « le beau est ce qui plait universellement sans concept ». Kant commence par positionner le beau dans le plaisir mais il ne peut pas s’agir de n’importe quel plaisir puisque nous savons qu’il faut distinguer entre ce qui me plaît et ce qui plaît. Aussi, Kant ajoute immédiatement l’universel ce qui soustrait le plaisir aux particuliers. Kant parle ici d’un plaisir intellectuel, d’un plaisir de l’esprit qui s’oppose au plaisir des sens, c’est-à-dire à l’agréable. Mais immédiatement Kant qualifie cet universel de sans concept. Or, nous savons que l’universel suppose une définition, une loi qui soit universellement recevable. Or, le beau n’en dispose pas, ce qui renvoie à la nature spécifique du beau comme ne pouvant être ressentie que subjectivement et ne pouvant pas s’expliquer par autre chose que la force vitale. Mais en même temps, la prétention à l’universelle tient au fait que comme acte d’un esprit celui-ci est pénétré de ce que nous appellerons la culture. Nous ne sommes pas que des hommes, nous sommes les hommes d’un temps, d’un lieu, d’une société. Et en même temps ce que nous éprouvons c’est possiblement l’universalité de l’émotion avant que d’être celle d’une culture particulière. 

Dès lors, nous savons que l’art ne poursuit pas d’autres fins que lui-même puisqu’il se confond avec la forme de ma propre existence. Kant dira, et c’est une Révolution, que l’art ne poursuit pas d’autres buts que lui-même, l’art pour l’art indépendamment de toutes autres satisfactions, celui-ci n’a plus besoin alors d’autres justifications que lui-même. L’artiste est donc libéré du pouvoir et de la religion, cette libération sonnant peut-être en même temps son glas viendra le temps des poètes maudits, des artistes qui deviennent désormais les ennemis à la fois du politique et du clergé. Kant a une lecture moderne de l’art, il est même celui qui introduit la modernité dans l’art. Auparavant, nous étions dans un cadre classique où l’art était nécessairement du côté du général et dans un cadre qui est celui du religieux, autrement dit la finalité de l’art était en dehors de l’art. A partir de la Renaissance (XIVème siècle), un courant va tenter d’objectivé le beau : c’est le moment du nombre d’or, les proportions du corps. Il y a donc une volonté de maitrise du beau qui s’achève avec Kant. L’art se libère de toutes les emprises, il est renvoyé à l’émotion esthétique. Baudelaire dira ainsi que le beau est cette rencontre entre le surnaturel et un sensible incarné. En disant cela, il reprend finalement la position kantienne. Ce n’est pas la rose en générale qui est belle, c’est cette rose qui renvoie ici et maintenant à une qualité générale que je suppose à travers mon jugement. Kant produit un effet de bascule. On peut ainsi prendre l’exemple de la peinture anatomique. On voit un corps sur une table, le ventre ouvert, les organes apparent, au dessus de lui trois médecins. On voit le contour exacte du foi et des organes tout autour, la précisions du trait renvoie à l’Ecole classique : il s’agit d’une nature morte. Rembrandt illustre ce que Kant pose dans la CFJ, il peint le bœuf écorché. Cette œuvre est révolutionnaire en ceci qu’elle rompt d’avec tout le classicisme. On y voit un bœuf écartelé et suspendu sur un étal de boucherie. Il est écorché, ouvert sur tout l’abdomaine et on y voit des organes qui sont brouillés, qui se superposent d’une teinture rouge qui suggère la présence du sang. En réalité, Rembrandt ne peint pas son modèle mais peint son regard sur le modèle. Nous sommes ici devant une perception de perception, le peintre peint la perception qu’il a du modelé, c’est-à-dire que ce corps ouvert et sanglant le dégoute, le rend nauséeux et c’est le trouble de ses sens qu’il rend visible à travers le trouble des organes il nous montre sa nausée, nous ne sommes plus devant le corps aseptisé du classicisme mais devant la sombre horreur de la mort. 

 

 

 

 

 

 

II- Hegel et la dialectique dans l’art 

A-    L’histoire de l’art 

L’esthétique est le titre de l’ouvrage qui regroupe la vision esthétique d’Hegel. Mais cet ouvrage de 1700 pages n’a pas été rédigé par Hegel. Ce sont les notes de cours de l’un de ses étudiants, notes qui ne constituent que 10 % de l’ouvrage, le reste étant lié à la récupération des cours d’autres étudiants qui ont assisté pendant près de 20 ans aux cours de Hegel. Ces notes sont donc posthumes. L’ouvrage se présente comme assez clair mais il est certainement déjà l’effet d’un appauvrissement de la pensée d’Hegel et une simplification. Dans cet ouvrage, Hegel montre la dialectique à l’œuvre dans l’histoire de l’art. Il va y distinguer 3 moments :

 Premièrement l’art égyptien qui est symbolique et qui renvoie d’abord à l’impossibilité de la coïncidence entre l’œuvre et celui qui la perçoit. La pyramide est finalement un tat de pierres sans ouverture, un bloc. Ce bloc renvoyant à l’impossibilité qu’ l’esprit à comprendre la mort, c’est le moment où l’esprit est étranger à la nature. Les Dieux y sont des animaux et les architectures et la statuaire sont à disposition de l’ignorance de l’au-delà, de la mort. Ce que Hegel montre à travers l’Egypte, c’est une réflexion absente sur la mort qui est considérée seulement comme effrayante.  L’absence de projection possible dans un au-delà est effrayante.

 Le deuxième moment est celui de l’art grec qui est aussi celui du classicisme. Les formes si incarnent. Le mimétisme est l’objet du classicisme, il s’agit de recopier à l’identique le modèle ou la nature. C’est aussi le moment d’un art vivant, c’est-à-dire comme le rappel Platon, que l’on s’attend à ce que les statues descendent de leur socle pour se mêler à la foule. C’est aussi ce moment du surnaturel dans l’art, les statues sont habitées par les Dieux, elles sont regardées comme ayant les propriétés des Dieux. C’est le moment où l’esprit se contemple lui-même, s’absorbe dans une forme parfaite qui est la sienne. Il n’y a plus d’étrangeté de la mort, de l’au-delà mais au contraire une proximité avec lui (au-delà).

- Puis vient le temps de l’art chrétien qui vient mêler à la fois l’étrangeté de la nature à la proximité des Hommes. Une cathédrale est une forêt de pierre, sa voute ressemble à une forêt. Mais tandis que la nature, lorsqu’elle est étrangère à l’esprit renvoie : « à la sombre horreur des bois. Les bois représentent l’étrangeté et l’extériorité à l’homme, l’homme y est dans un contact direct avec une nature qui étouffe son humanité tandis que dans la cathédrale l’architecture de pierres fait circuler et monter la parole jusqu’au cieux, la prière est porter par les murs. C’est une forêt profondément humaine qui vient synthétiser à la fois la présence de la nature et la capacité des hommes à se saisir d’elle pour la transformer. Le temps des cathédrales est celui où l’esprit n’a plus besoin de regarder dans les œuvres mais se regarde lui-même. Il est à la disposition de la prière et de l’élévation. 

B-    La mort de l’art 

Hegel dans L’esthétique parle de la mort de l’art. En fait, la traduction exacte serait plutôt « le passé de l’art » que nous traduisons par mort en ceci que Hegel signifie ainsi ce moment où l’art a fini d’être vivant. Au XIXème siècle, apparaissent pour la première fois les musées. Les statues sont retirées de leur temple, retirées des places publiques et placées dans les musées. En même temps, l’art était aussi rapté par des collectionneurs privés et le peuple ni accédait pas. A partir des musées, l’art devient public mais simultanément il perd ce qui faisait sa force, sa participation à la vie quotidienne. Hegel parle donc bien de deux moments de l’art : un moment passé où l’art incarnait des valeurs, où ils était prit dans la spiritualité ; et une seconde période où l’art vaut par lui-même mais dès lors n’inspire plus cet élan de spiritualité pour rejoindre un cadre plus intime celui que Kant nomme élan vital et qui est le rapport que j’entretient individuellement avec l’œuvre. Ainsi, l’autonomie de l’art se construit conjointement avec l’autonomie de l’individu. Pour Hegel, la mort de l’art dont il parle concerne le fait que désormais celui-ci ne nous fait plus plier le genou. L’art en même temps qu’il prend la destination de l’individu perd celle de la société. Ce n’est plus l’art pour tous mais l’art pour moi. En même temps, nous l’avons vu avec le bœuf écorché, l’art quitte le sol de la représentation. Il s’affranchi du modèle. Vang Gogh parlant du café de nuit dira : « c’est pourquoi j’ai choisi la couleur lie de vin pour souligner la mort qui rode dans le café ». L’émancipation de la couleur permet de souligner une proposition kantienne. Un objet n’est pas beau en lui-même mais parce que je le décide tel. La beauté est une propriété de l’esprit et non pas de l’objet. 

Conclusion : 

On peut conclure en posant que si l’art a acquis son autonomie, devenant un objet à la fois sensible et intellectuel, le statut de l’artiste s’est dans le même temps modifié. Auparavant parler par les Dieux ou vassal du souverain il est devenu symbole de rébellion et de résistance au XIXème siècle, en cela qu’il échappe à la production industrielle et à la standardisation des biens. Il reprend donc la définition de l’œuvre en ceci que l’artiste déploie un univers, un monde mais cette univers se trouve lui-même pris à partir du XXème siècle dans un marché de l’art qui en certains points renvoient l’art du côté d’une ais sont donc sous le joug mode. La mode par définition 

La mode par définition est une tendance qui s’inscrit dans un style supporter prune époque. Or, l’art est permanent tandis que la mode passe. Une œuvre serait donc ce qui résiste au temps, c’est-à-dire ce qui dépasse la mode tout en possiblement en faisant partie. On pourrait prendre la peinture de Vermeer au XVIIIème siècle qui en même temps que l’œuvre correspond à l’époque, celle-ci nous est  encore sensible. Ainsi, la jeune fille à la perle est en même temps qu’une œuvre figurative le claque d’une émotion amoureuse. Hegel dira de cette peinture hollandaise qu’elle représente: « une peintre de l’esprit ». Or, ici nous nous retrouvons étonné car en effet, ce que Vermeer montre c’est une femme assise devant sa maison en train de coudre, une laitière versant du lait, une réunion lors d’un banquet, enfin un moulin avec le paysage d’un canal. Rien de grand donc, rien de sublime, plutôt le spectacle du quotidien ou encore une peinture naturaliste. Mais, dit Hegel, il faut lire autrement ces tableaux. Ce sont dit Hegel des peintures de guerres car la Hollande est occupée. Les Hollandais sont donc sous le joug d’une dictature étrangère et le simple fait donc de pouvoir tricoter devant sa porte ouverte signifie une liberté recouvrée, retrouvée. Le banquet est constitué de gentilhomme en arme. L’occupant interdisait toute réunion de plus de trois personnes en dehors du cadre familial. Alors les conspirateurs se retrouvent à un repas, l’un tient le verre levé à sa main gauche mais la droite est au fourreau de l’épée. De même que tous les regards convergent vers le spectateurs, on peut lire dans le regard à la fois la crainte et la détermination. Il s’agit bien d’une peinture de l’esprit car ce qui ailleurs est naturel à du, ici, être gagné de hautes luttes. Même un simple paysage raconte l’histoire de l’homme contre la nature, il y a dans un sens une méta peinture qui s’adresse non plus au sens mais à l’esprit. 

Le désir : faut-il désirer l'impossible ?

 


Le désir : « Faut-il désirer l’impossible ? »

 

Introduction générale :

Le désir s’exprime d’abord comme une tension vers un objet (sens sociologique). C’est-à-dire que j’ai la volonté d’obtenir cet objet et que durant tout le temps où je suis tendue vers lui, celui-ci me manque. Le désir suppose donc l’absence. Et cette absence est douloureuse. Désirer c’est donc vouloir mais ne pas avoir. J’ai en même temps la volonté de le posséder et la conscience douloureuse de son manque. Etymologiquement, le désir renvoie à deux termes latins. Le premier est Considèrerai qui signifie le fait de contempler un astre, une étoile et de si complaire. Le second terme est Desiderare qui signifie qu’alors que je me tourne vers les cieux, à la place de l’étoile, je ne vois rien. Dans ce cas je désir voir l’étoile absente. Je suis dans le manque de l’étoile. Il y a donc ici deux situations : une première qui est celle du plein ou le contentement est contemporain de la contemplation. La seconde situation est celle du vide. Alors que je souhaite voir l’étoile, celle-ci n’est pas visible. Cette absence est ici, souffrance. Mais il y a un autre paramètre dont nous n’avons pas tenu compte : Je peux considérer un astre, le contempler, le regarder alors même qu’il est depuis longtemps mort. La vitesse de la lumière, pour que l’image de l’astre parvienne jusqu’à moi suppose un délai de plusieurs dizaines d’années. Ainsi je ne vois que la lumière réfléchi de l’astre et non l’astre lui-même. Ici la présence est une illusion. L’astre est déjà mort alors que je crois le voir. Ici la présence est donc absence ou possiblement absence. Dans le cas, le moment du Desiderare est le redoublement de cette absence avec la conscience de l’absence. Ce qui impliquerait que nous soyons en constamment dans le désir. On pourrait dire que l’absence fait partie de la définition même de l’homme : le désir est thétique de soi. C’est-à-dire qu’il est définitionnel au même titre que le langage est le propre de l’Homme. On voit que le désir n’est pas l’épiphénomène d’une situation qui serait celle d’un plein habituelle mais qu’au contraire, le désir s’insinue jusque dans la présence de l’objet et que finalement le désir n’est pas extérieur à nous mais intérieur. Il est peut-être la façon proprement humaine d’échapper ou d’oublier la présence de la morte. 

Introduction : 

A la question Faut-il désirer l’impossible ? Nous serions tentés d’abord de répondre que c’est l’impossible qui est l’aiguillon du désir. Vouloir le possible n’étant rien d’autre que vouloir ce que je peux avoir. Ainsi la volonté s’oriente vers l’impossible c’est-à-dire vers ce que l’on sait ne pas être tenable. Mais immédiatement nous serions tentés d’objecter que le possible d’aujourd’hui était bien l’impossible d’hier : aller sur la lune, sous les eaux, dans les airs n’est-ce pas le rêve d’Icare qui s’incarne dans l’avion supersonique. Autrement dit le génie humain se donne comme désir quelque chose qui ne l’est actuellement pas et ce faisant permet des avancés et une modification du possible lui-même. Les contes nous parlent de cette autre impossible qu’est celui de l’amour éternel. N’est-ce pas suffisant pour tenter de l’atteindre ? Ce que le désir vise alors c’est l’absolue qui peut être l’autre nom de l’impossible. Dépasser  nos contraintes physiques, dépasser les contraintes spatiales, dépasser les contraintes intellectuelles et parfois morales, n’est-ce pas la finalement le but de tout désir ? 

I)              L’impossible est le but de tout désir, il se présente d’abord comme une nécessité 

 

A)   La cristallisation de désir

Stendhal dans « De l’amour »  décrit le processus de cristallisation amoureuse. Il raconte une promenade près des mines de Szalsbourg. Il plante dans une saline un morceau de bois ordinaire et poursuit sa promenade. Trois semaines plus tard il repasse par le même endroit et voyant émerger le haut de son bâton, il le tire de la saline « un sceptre brillant de mille diamants. »  Cette analogie nous permet de comprendre que le désir vient parer un objet ordinaire de qualités extraordinaire. Je viens donc projeter sur un homme ou une femme tout ce que j’imagine comme étant ces qualités afin qu’il puisse répondre à ma demande d’idéale. Mais cette opération est complexe car en même temps que je fabrique moi-même l’objet de mon désir, je dois ignorer que ces qualités ne sont pas les siennes. Autrement dit je dois fabriquer un objet et oublier que je l’ai fabriqué. C’est le concept de subreption (Kant) qui vient faire comme si l’objet m’était imposé de l’extérieur. Comme si c’était une fatalité. Comme si il s’agissait d’un coup de foudre. 

 

B)   La sublimation 

Ainsi l’individu construit un objet imaginaire et oublie dans le même mouvement qu’il en est le créateur. L’objet possède donc les qualités projeté de son créateur. Ici nous retrouvons la cristallisation dont parlait Stendhal. Un objet ordinaire (commun) est sublime. C’est-à-dire qu’il est paré de toutes les qualités et toutes les vertus. Le sublime à cette définition : « Ce à coté de quoi tout le reste est petit. » dans La faculté de juger écrit par Kant. C qui signifie qu’est sublime ce qui est toujours plus grand. Il y a donc quelque chose de l’adoration dans le sublime qui confère à l’objet désirer un statut à part. « Un seul être vous manque et tout est dépeupler. »  (Lamartine) Ce qui signifie qu’il y a dans la relation un changement dans la conception du monde. Ce que l’on appelle une conversion du regard qui ne supprime pas le monde mais qui lui donne un unique visage. Et tous ceux qui comptaient pour vous n’existent quasiment plus. Il n’y a donc pas une suppression du monde mais remplacement du monde, ce qui nous permet de comprendre que dans la relation amoureuse le suicide soit une option possible. En effet la conversion du regard est liée à un mécanisme d’illusion qui fabrique en même temps un objet idéal et un monde qui ressemble à cet objet. Aussi si l’objet vient à manquer c’est le monde lui-même qui vacille. 

 

C)   L’imagination est maitresse du désir / L’impossible comme moteur d l’évolution 

L’imagination est donc à l’origine de la relation amoureuse. Le sujet se prend lui-même comme objet mais projette sur autrui ces propres déterminations. En un sens le désir ici est aveugle au sujet en face de lui pour ne plus y voir que l’objet de son fantasme. En ce sens le désir est d’abord une donnée psychologique. Cette donnée psychologique est erratique. Elle choisit un sujet et peut le décliner en des formes diverses. Ainsi si le sujet aime tel ou tel élément, par exemple, participé à une chasse aux sangliers il peut avec le temps passer du sanglier au lapin, puis avec l’âge s’intéresser aux livres sur la vénerie pour enfin dans son grand âge, devenir bibliophile. Ici nous avons assisté à un déplacement. L’individu qui aime la chasse va pourtant modifier sa pratique pour continuer à faire exister ici comme sujet ici le verbe chassé. Il y a ici ce que nous appellerons un déplacement du désir qui permet d’assouvir la tendance tout en modifiant son objet. Il y a donc une capacité adaptative de la tendance avec déplacement d’objet et en ajout le fait que tout est tendance, toute inclination vers un objet implique le désir avec des variations qui ne sont que du moins vers le plus. Ainsi la lionne esquisse son bon avant de fondre sur sa proie. Ribaut (psychologue du 19eme) que tout est tendance, qu’elle est mouvement avec cette précision, qu’elle suppose une intention et un objectif. Ici la tendance est un intervalle entre l’intention et l’objectif. 

 

II)             La nature du désir / Le possible 

 

A)   Le désir comme tension / la pulsion 

Le désir suppose donc une tension vers un objet mais toute tension est douloureuse. Elle implique une excitation qui ne peut se résoudre que par l’obtention de l’objet visé. En fait la pulsion entretient un rapport économique avec l’excitation, plus elle est différé plus elle s’intensifie. Si l’on prend comme modèle la relation sexuelle, son moment le plus haut correspond à la jouissance qui n’est rien d’autre que la suppression massive de l’excitation et donc du déplaisir qui l’accompagne. Ce qui est enregistré comme jouissance, c’est-à-dire comme satisfaction n’étant rien d’autre que la suppression d’une excitation douloureuse. C’est une chute massive de l’excitation. La pulsion a donc un rôle régulateur. Elle engage la poursuite de son action jusqu’à satisfaction. Et elle obtiendra satisfaction qu’elle que soit les circonstances. Autrement dit la pulsion se transforme si elle ne peut s’assouvir. 

 

B)   La double nature du désir 

Hésiode dans « Les travaux et les jours »  fait le récit des Dieux avec cette idée présente pour nous que pour les grecs se sont les poètes (Homère, Hésiode …) sont ceux qui raconte les Dieux. Les mythes fondateurs grecs mettent en scène trois puissances. Il y a Gaïa (terre), Kaos (désordre) et Eros (désir). Au début de toute chose il y a Gaïa qui est une partie matérielle entouré de néant. On ne peut rien advenir de Kaos car c’est le chaos, le désordre absolu. Eros, lui, est une puissance de révélation. Il ne peut exercer son pouvoir sur Kaos. Il va l’utiliser sur Gaïa et l’a poussé à faire advenir d’elle le multiple. Désormais Ouranos (ciel) est dans un acte de copulation permanant. Sans espace entre eux, Gaïa voit ses enfants naitre et vivre en son sein. Gaïa demande à l’un de ses enfants Chronos (temps) de la libérer. Pour cela elle force une harpé (serpe) avec laquelle Chronos va trancher le sexe d’Ouranos. Celui-ci est alors violement éjecté de Gaïa pour rejoindre la place qu’il occupe aujourd’hui. Le sexe tranché avant d’atterrir dans l’eau laisse tomber des gouttes de sangs sur Gaïa. Ses gouttes de sang donneront naissance à la puissance de la vengeance famille. On ne peut pas toucher aux membres de sa famille. Chronos est maudit. Le sexe tranché atterri dans l’eau, le sperme qu’il contient encore se mélange avec les eaux, l’écume. Donnant naissance à la déesse de l’amour Aphrodite qui plus tard aura une descendance avec la pitié, la misère. Cet enfant se nommera Eros. Il y a donc dans la mythologie grecque, deux Eros. L’Eros premier le fondamentale. L’Eros second. Le premier est une puissance de séparation et en même temps de révélation. A partir de l’un il crée le multiple. Il est force de multiplication comme puissance. Il est tellurique c’est-à-dire qu’il ; est une puissance de violence, de force, de contrainte. Eros second, fils d’Aphrodite est au contraire une puissance d’une union de retour vers l’un avec le multiple il crée de l’unité. Il est aussi cette amour courtois qui donne la passion amoureuse symboliser par Cupidon, de deux cœurs, faire un. Les grecs parviennent donc à maintenir en tension deux pôles opposés : La séparation et l’union, la division et l’addition. Ce que cela nous apprend c’est qu’il n’existe pas pour les grecs de désir sans violence, sans séparation d’avec une partie de soi-même, sans rupture. Et que dans le même moment le désir peut être aussi amour, volonté de fusion, réunion. C’est ce que l’Occident a oublié. Le christianisme rejetant violemment ou oubliant l’Eros premier au seul profit de l’Eros second. 

 

C)   Mythes des Androgynes 

Platon dans « Le banquet » raconte le mythe des Androgynes qui est un mythe de l’origine des hommes. Au début nous étions des sphères avec 4 bras, 4 jambes et 2 faces. Nous nous déplacions très rapidement avec nos 8 membres. Ces sphères prenant conscience de leurs forces ont défiés le pouvoir de Zeus. (Ces sphères sont Androgynes c’est-à-dire qu’elles peuvent être mâle-mâle, mâle-femelle, femelle-femelle) Zeus est en colère et décide de punir les Hommes. Avec sa foudre il les tranchent en deux. Les deux faces se séparent et tombe sanguinolente par terre. Mais ainsi tranchés, les hommes vont disparaitre, alors il charge Héphaïstos de réparer les hommes. Celui-ci se saisit de la peau de chaque côté de la couture et referme la blessure en cousant la peau. La trace en est le nombril. Et pour que les hommes ne songes plus à défié Zeus, il prend la tête et la tourne du côté de la cicatrice. Afin que les hommes n’oublient pas le châtiment infligé par Zeus et leur faute. Mais ces êtres divisés qui désormais rampent au sol n’ont qu’une idée en tête. Retrouver leur moitié perdue. Alors quand ils trouvent une moitié, ils s’agrippent mutuellement et ne se lâchent plus. Zeus est embêté. Il charge donc Héphaïstos d’une mission. Il lui demande de retourner aussi les organes de la génération (sexes). Désormais les deux moitiés, quand elles se saisissent, ont leurs organes sexuels qui rentrent en contact. La sexualité advint. La jouissance arrive. L’apaisement de la tension conduit les corps à se séparer avant qu’ils se retrouvent à nouveau pour toujours se séparer encore. La sexualité prônée par le Christianisme comme figure de l’union est enfaite une séparation des corps et une séparation des esprits. Elle n’est inventée que pour que la division advienne. 

 

III)           Le désir comme marque de l’humaine condition 

 

A)   Opposition de raison / passion

On oppose la raison aux passions. On peut immédiatement noter que la raison est pensée du côté de l’unité, qui donc n’est pas divisée face à une multitude de passions. Ce qui suppose immédiatement un statut dévalorisé des passions par rapport à la raison. L’étymologie nous renseigne immédiatement sur les raisons de cette dévalorisation : raison vient de ratio qui signifie penser, mesure qui conduit à poser que la raison est active. Elle est action. Tandis que les passions viennent de patior qui signifie subir, pâtir. Autrement dit, les passions sont du côté de la passivité. La raison est interne, elle engage la volonté tandis que la passion est externe, qu’elle est contrainte. Cette activité de la volonté conduit à définir des mesures c’est-à-dire la réflexion. Cette réflexion conduit à penser la raison du côté de l’esprit. Au contraire la passion st du côté de la démesure (Hubris). Elle est une propriété du corps. L’âme sera donc pensée, ce qui impliquera qu’elle possède la vertu. Tandis que les passions seront considérées des côtés des pêchers. Ce qui conduit à divisé le corps et l’âme. Ce qui d’un point de vu philosophique est entrepris et réalisé par Platon. Platon distingue trois états de l’Homme. Cette tripartition de l’âme distingue, le souffle comme puissance, le nombril et son bas ventre comme siège des désirs et enfin la pensée qui elle-même possède un nombril mais celui-ci céleste. Pour les grecs le souffle s’additionne soit à l’esprit, soit au bas ventre mais jamais l’un ou l’autre ne sera totalement supprimé. Platon dira «  il faut mettre la raison au gouvernail du monde. » Sous entendant ainsi que nous sommes balloté sur un vaisseau qui navigue dans la tempête des désirs et des passions et que seul la raison peut être notre boussole. On retrouvera cela dans « l’apologie » de Socrate ou Platon raconte la mort de Socrate. Socrate a été condamné à mort pour impiété et pour corruption de la jeunesse. On permet à Socrate d’échapper à la mort mais il refuse en disant « je préfère mourir sous de mauvaises lois que sans lois. » La mort est donnée par absorption d’un poison la cigüe. Socrate  absorbe le poison. Il faut savoir que Socrate est celui qui sait détacher de son vivant des passions. Il est mort au monde pour renaitre aux idées. Il qualifie le corps de bourbier le l’âme. Mais en même temps il goute aux plaisirs des corps et aux plaisirs des banquets sans jamais être atteint par l’Hubris, la démesure, ni l’alcool. Mais au moment ou Socrate boit la poison, il à un tressaillement. Celui-ci peut être du par l’amertume du poison ou par une incertitude au moment de la mort elle-même.

 

B)   Différence besoins / passions = « Malheur à qui n’a plus rien à désirer. » Rousseau 

Le Moyen Age, vient consacrer cette division de l’âme et du corps. On qualifie le Moyen Age comme le crépuscule des émotions. Cette formule signifie que le Moyen Age est ce moment où l’on passe d’une émotion à l’autre. De la violence à la bonté dans le même intervalle de temps. Crépuscule parce que c’est le moment flamboyant des passions et n même temps de leur automne. L’époque moderne vient penser autrement le rapport aux passions. C’est déjà l’amorce du romantisme et l’athéisme révolutionnaire vient briser le rapport à une raison qui serait commandé par Dieu lui-même. Rousseau est le penseur de la passion. D’un retour au corps qui est aussi retour à une nature qui est en train d’être perdue par l’industrialisation naissante. Il reprend ce que l’on nomme au 18 ième la carte du tambre (cf. Google). Cette carte montre que nous nous dirigeons entre des passions qui sont bénéfiques ou non. Tout dépend de l’intention qu’est la nôtre. Ici on voit naitre le début de l’âge de la responsabilité individuelle, de la volonté. Avec une réhabilitation massive des passions. Epicure écrivait déjà qu’il faut distinguer entre besoins et passions. Les besoins sont naturels tandis que les passions sont artificielles. A partir des besoins élémentaires : manger, boire, dormir, se reproduire. Les désirs viennent s’emparer de ces besoins pour construire avec eux une sophistication qui conduit à injecté du désir dans tous les pans de la société (La publicité : travail sur du désir. Pub de voiture s’accompagne d’éléments désirable en terme de statut sociale …) Rousseau reprend la formule de Platon en changeant son sens. Il indique qu’il faut mettre la vertu au gouvernail du monde. Mais la vertu pour Rousseau est une passion. Rousseau inscrit en effet que la raison ne peut jamais vaincre une passion. Car la raison est froide tandis que la passion est chaude. Ainsi une allumette fait fondre un glaçon. On ne peut éteindre un gigantesque incendie que par le souffle d’une explosion. Pour Rousseau seul une passion peut maitriser une autre passion. La raison à toujours déjà perdue. Plus encore la raison est un épiphénomène de la passion. 

 

C)   L’impossible est projection vers le future et construction d’un sens 

Le désir est toujours lié à une projection, au fait d’une tension. En ce sens la présence du désir est toujours une forme d’absence à l’évènement et au circonstance du présent. Le désir s’appuie sur la passé et se projette vers le future en oubliant la réalité du moment. On pourrait le comparer à un coureur qui s’élance dans une descente. Il court de plus en plus vite jusqu’à ce que ses jambes courent plus vite que lui. C’est le moment juste avant la chute, mais c’est aussi le moment grisant du dépassement de ses possibles. On trouve cette assimilation radicale à la passion dans « L’avare » de Molière. Celui-ci accumule l’Or sans s’en servir jamais. Il est mal habillé, mal nourri. Il n’est donc pas dans la jouissance cet or qu’il accumule. Il ne l’est pas car il est entièrement dans le désir. En effet il est non pas dans la jouissance mais dans une capacité de jouissance. Ce qu’il vise c’est une jouissance absolue qui ne peut être satisfaite par un objet particulier. Lorsqu’il s’aperçoit que sa cassette est dérobée il s’exclame « Au voleur, A l’assassin. » La passion vient finalement se confondre avec un autre être lui-même. Elle n’est pas distinguée de nous, elle est ce que nous sommes. Ce qui signifie que la réalité elle-même est le produit de notre propre conception du désir.